27 May 2007
Pas de premier prix pour une première édition
Pas de premier prix pour une première édition
Le Jury du premier Concours de Direction d’Orchestre Evgeny Svetlanov a décidé de ne pas attribuer de premier prix.
Le deuxième prix a été attribué à Benjamin Ellin (Royaume-Uni)
Le troisième prix à Roberto Forés Veses (Espagne)
Le prix du public a récompensé Benjamin Ellin
Ce mardi 29 mai, à 20h00, à la Philharmonie de Luxembourg, un Concert de Gala permettra de retrouver l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg et les deux lauréats :
- Roberto Forés Veses dirigera « L’Aube dans les champs » d’Evgeny Svetlanov et le Concerto pour piano et orchestre en la mineur, op.16, d’Edvard Grieg, dont le soliste sera Boris Berezovski.
- Benjamin Ellin dirigera la Symphonie n°2 en mi mineur, op.27, de Sergei Rachmaninov
Stéphane Gilbart
Le Jury du premier Concours de Direction d’Orchestre Evgeny Svetlanov a décidé de ne pas attribuer de premier prix.
Le deuxième prix a été attribué à Benjamin Ellin (Royaume-Uni)
Le troisième prix à Roberto Forés Veses (Espagne)
Le prix du public a récompensé Benjamin Ellin
Ce mardi 29 mai, à 20h00, à la Philharmonie de Luxembourg, un Concert de Gala permettra de retrouver l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg et les deux lauréats :
- Roberto Forés Veses dirigera « L’Aube dans les champs » d’Evgeny Svetlanov et le Concerto pour piano et orchestre en la mineur, op.16, d’Edvard Grieg, dont le soliste sera Boris Berezovski.
- Benjamin Ellin dirigera la Symphonie n°2 en mi mineur, op.27, de Sergei Rachmaninov
Stéphane Gilbart
Vue sur l’orchestre, vu de l’orchestre
Vue sur l’orchestre, vu de l’orchestre
Un musicien, c’est aussi un instrument qui, dans certains cas d’ailleurs, a un réel rôle à jouer, et nous nous souvenons du bonheur de Renaud Capuçon d’être devenu le dépositaire du Stradivarius « Vicomte de Panette » d’Isaac Stern. Un chef d’orchestre, c’est aussi un orchestre. Et au moment où la première édition du Concours Evgeny Svetlanov va livrer son résultat, nous aimerions saluer l’excellent « outil de travail », l’instrument remarquable qu’a été pour les candidats l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg, l’OPL.
Pendant une semaine, il s’est plié aux injonctions des dix-huit sélectionnés, des dix demi-finalistes, des quatre finalistes. Il a joué le jeu, « s’engageant » dans un travail limité dans le temps et sans la perspective d’un concert ou d’une série de concerts. Toujours, au cours de ces longues journées, l’orchestre a fait preuve d’une extrême disponibilité, très attentif. Son programme était lourd : les Beethoven, Tchaïkovski, Bartok, Svetlanov et Rachmaninov imposés, la quarantaine de propositions initiales pour les œuvres librement choisies par les candidats (du « beau » travail aussi pour son bibliothécaire et son régisseur).
Cette disponibilité, cet engagement – ce professionnalisme – nous ont valu de beaux moments d’intensité et d’émotion musicales.
*
Nous avons rencontré deux de ses musiciens qui nous ont donné un point de vue venant de l’intérieur de l’orchestre.
Philippe Koch, son Konzertmeister, rappelle d’abord que l’OPL a déjà été l’« instrument », et cela à plusieurs reprises, d’un concours de direction d’orchestre, celui de Besançon. Il se réjouit de sa semaine de travail avec des candidats aux personnalités, aux tempéraments si différents, manifestant rapidement leur tendance « musicale » ou « technicienne ». Le Svetlanov, une pièce brève dix fois répétée a ainsi offert un éventail de tempi, de phrasés, d’impulsions, de mise en évidence de telle ou telle voix, d’intérêt ou non porté à son intervention en solo de premier violon. Philippe Koch revient sur la difficulté du travail pour l’orchestre et salue la disponibilité, l’attention, la sympathie de ses camarades pour les candidats, et parle même de leur « bravoure », l’orchestre étant parallèlement engagé dans d’autres prestations tout à fait différentes : jazz symphonique, projet avec des jeunes.
Damien Pardoen, l’un des premiers violons, souligne que si un Beethoven, par exemple, ne pose pas de problème à l’orchestre, il lui faut belle énergie et solide investissement pour s’approprier rapidement des pièces moins jouées et sous des conduites pas toujours assurées, révélatrices de l’éternel antagonisme entre directions de technique contrôlée et de musicalité proclamée. Il a beaucoup apprécié le téléscopage si rapide des différents types de direction : gestuelle, explicative, charismatique. Il insiste, exemples à l’appui, sur la façon dont l’orchestre s’est voulu « neuf » à chaque fois pour chacun des candidats.
*
Mais place aux finalistes. Une heure dix était accordée à chacun pour présenter une œuvre imposée : la deuxième ou la troisième symphonie de Sergei Rachmaninov, et une œuvre choisie par le Jury parmi trois propositions personnelles.
Roberto Forés Veses (Espagne, 36 ans) a choisi la deuxième symphonie de Rachmaninov. Il s’interrompt régulièrement pour commenter son point de vue et donner des indications à l’orchestre, en tout ou en parties. Ce qu’il nous propose est sans grand relief, malgré quelques plus solides montées en crescendo, quelques points de vue plus marqués ; c’est qu’aujourd’hui, il reste comme « en retrait ». Une impression que confirme sa première symphonie de Brahms. Le jeune chef - sa façon de resserrer les épaules et de réduire l’amplitude de ses gestes le prouve - semble gagné par un trac qui atténue l’élan et le jeu de nuances de son interprétation.
Rossen Gergov (Bulgarie, 26 ans) commence, lui aussi, par la deuxième symphonie de Rachmaninov. Il dirige d’une baguette nerveuse et précise, fournit des explications tantôt en anglais tantôt en français ; il a de la « présence ». « L’Oiseau de feu » est manifestement pour lui, un « cheval de bataille ». On sent qu’il a préparé – et même minuté – son intervention. Il est très soucieux des contrastes de rythme et de climat, mais à un point tel que, ayant fait le choix du brio, il en arrive à trop ralentir ou accélérer, trop alléger ou souligner des séquences, au détriment d’une cohérence de l’ensemble.
Debora Waldman (Israël-Brésil, 29 ans) a décidé de commencer sa prestation par la deuxième symphonie de Brahms. Très vite, elle interrompt l’orchestre pour revoir des détails de son interprétation. Ses premières explications sont intéressantes en ce sens que non seulement elle parle, mais que ses mains transcrivent et imagent ce qu’elle dit. Elle s’exprime et dirige tranquillement. Elle fait retravailler les cordes, encore et encore. Mais en fait, et cela va se confirmer dans son travail sur la troisième symphonie de Rachmaninov, elle ne quittera pas ce « régime dissocié », cette approche « pointilliste » de son rapport à l’orchestre. Son souci du détail est tel que le public n’aura pas l’occasion d’entendre une longue séquence des mouvements étudiés.
Benjamin Ellin (Royaume Uni, 27 ans) commence par son morceau imposé, la deuxième symphonie de Rachmaninov. C’est un chef serein, qui communique sa sérénité à l’orchestre. Chez lui, pas ou peu de paroles : il fait exécuter tout le mouvement, le marquant nettement déjà de sa vision personnelle. Quand il reprend un passage ou l’autre, on constate que l’orchestre l’a suivi et que l’interprétation de l’oeuvre a pris de l’ampleur et s’est densifiée. Benjamin Ellin nous propose ainsi rapidement une vision cohérente, unifiée du mouvement. Dans les « Variations sur un thème de Haydn » de Brahms, une pièce que l’orchestre n’a plus travaillée depuis longtemps, il fait preuve des mêmes qualités.
Le Jury s’est retiré pour délibérer…
Stéphane Gilbart
Un musicien, c’est aussi un instrument qui, dans certains cas d’ailleurs, a un réel rôle à jouer, et nous nous souvenons du bonheur de Renaud Capuçon d’être devenu le dépositaire du Stradivarius « Vicomte de Panette » d’Isaac Stern. Un chef d’orchestre, c’est aussi un orchestre. Et au moment où la première édition du Concours Evgeny Svetlanov va livrer son résultat, nous aimerions saluer l’excellent « outil de travail », l’instrument remarquable qu’a été pour les candidats l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg, l’OPL.
Pendant une semaine, il s’est plié aux injonctions des dix-huit sélectionnés, des dix demi-finalistes, des quatre finalistes. Il a joué le jeu, « s’engageant » dans un travail limité dans le temps et sans la perspective d’un concert ou d’une série de concerts. Toujours, au cours de ces longues journées, l’orchestre a fait preuve d’une extrême disponibilité, très attentif. Son programme était lourd : les Beethoven, Tchaïkovski, Bartok, Svetlanov et Rachmaninov imposés, la quarantaine de propositions initiales pour les œuvres librement choisies par les candidats (du « beau » travail aussi pour son bibliothécaire et son régisseur).
Cette disponibilité, cet engagement – ce professionnalisme – nous ont valu de beaux moments d’intensité et d’émotion musicales.
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Nous avons rencontré deux de ses musiciens qui nous ont donné un point de vue venant de l’intérieur de l’orchestre.
Philippe Koch, son Konzertmeister, rappelle d’abord que l’OPL a déjà été l’« instrument », et cela à plusieurs reprises, d’un concours de direction d’orchestre, celui de Besançon. Il se réjouit de sa semaine de travail avec des candidats aux personnalités, aux tempéraments si différents, manifestant rapidement leur tendance « musicale » ou « technicienne ». Le Svetlanov, une pièce brève dix fois répétée a ainsi offert un éventail de tempi, de phrasés, d’impulsions, de mise en évidence de telle ou telle voix, d’intérêt ou non porté à son intervention en solo de premier violon. Philippe Koch revient sur la difficulté du travail pour l’orchestre et salue la disponibilité, l’attention, la sympathie de ses camarades pour les candidats, et parle même de leur « bravoure », l’orchestre étant parallèlement engagé dans d’autres prestations tout à fait différentes : jazz symphonique, projet avec des jeunes.
Damien Pardoen, l’un des premiers violons, souligne que si un Beethoven, par exemple, ne pose pas de problème à l’orchestre, il lui faut belle énergie et solide investissement pour s’approprier rapidement des pièces moins jouées et sous des conduites pas toujours assurées, révélatrices de l’éternel antagonisme entre directions de technique contrôlée et de musicalité proclamée. Il a beaucoup apprécié le téléscopage si rapide des différents types de direction : gestuelle, explicative, charismatique. Il insiste, exemples à l’appui, sur la façon dont l’orchestre s’est voulu « neuf » à chaque fois pour chacun des candidats.
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Mais place aux finalistes. Une heure dix était accordée à chacun pour présenter une œuvre imposée : la deuxième ou la troisième symphonie de Sergei Rachmaninov, et une œuvre choisie par le Jury parmi trois propositions personnelles.
Roberto Forés Veses (Espagne, 36 ans) a choisi la deuxième symphonie de Rachmaninov. Il s’interrompt régulièrement pour commenter son point de vue et donner des indications à l’orchestre, en tout ou en parties. Ce qu’il nous propose est sans grand relief, malgré quelques plus solides montées en crescendo, quelques points de vue plus marqués ; c’est qu’aujourd’hui, il reste comme « en retrait ». Une impression que confirme sa première symphonie de Brahms. Le jeune chef - sa façon de resserrer les épaules et de réduire l’amplitude de ses gestes le prouve - semble gagné par un trac qui atténue l’élan et le jeu de nuances de son interprétation.
Rossen Gergov (Bulgarie, 26 ans) commence, lui aussi, par la deuxième symphonie de Rachmaninov. Il dirige d’une baguette nerveuse et précise, fournit des explications tantôt en anglais tantôt en français ; il a de la « présence ». « L’Oiseau de feu » est manifestement pour lui, un « cheval de bataille ». On sent qu’il a préparé – et même minuté – son intervention. Il est très soucieux des contrastes de rythme et de climat, mais à un point tel que, ayant fait le choix du brio, il en arrive à trop ralentir ou accélérer, trop alléger ou souligner des séquences, au détriment d’une cohérence de l’ensemble.
Debora Waldman (Israël-Brésil, 29 ans) a décidé de commencer sa prestation par la deuxième symphonie de Brahms. Très vite, elle interrompt l’orchestre pour revoir des détails de son interprétation. Ses premières explications sont intéressantes en ce sens que non seulement elle parle, mais que ses mains transcrivent et imagent ce qu’elle dit. Elle s’exprime et dirige tranquillement. Elle fait retravailler les cordes, encore et encore. Mais en fait, et cela va se confirmer dans son travail sur la troisième symphonie de Rachmaninov, elle ne quittera pas ce « régime dissocié », cette approche « pointilliste » de son rapport à l’orchestre. Son souci du détail est tel que le public n’aura pas l’occasion d’entendre une longue séquence des mouvements étudiés.
Benjamin Ellin (Royaume Uni, 27 ans) commence par son morceau imposé, la deuxième symphonie de Rachmaninov. C’est un chef serein, qui communique sa sérénité à l’orchestre. Chez lui, pas ou peu de paroles : il fait exécuter tout le mouvement, le marquant nettement déjà de sa vision personnelle. Quand il reprend un passage ou l’autre, on constate que l’orchestre l’a suivi et que l’interprétation de l’oeuvre a pris de l’ampleur et s’est densifiée. Benjamin Ellin nous propose ainsi rapidement une vision cohérente, unifiée du mouvement. Dans les « Variations sur un thème de Haydn » de Brahms, une pièce que l’orchestre n’a plus travaillée depuis longtemps, il fait preuve des mêmes qualités.
Le Jury s’est retiré pour délibérer…
Stéphane Gilbart
25 May 2007
Labels: Rossen Gergov - DR P. Hurlin
Labels: Deborah Waldman- DR P. Hurlin
Labels: Benjamin Ellin-DR P.Hurlin
Ils ne seront que quatre en finale
C’est après une assez brève délibération que le Jury a communiqué ses choix. Il s’agissait donc , nous ont confirmé plusieurs de ses membres, de retenir des candidats combinant technique et précision avec une efficacité à partager avec l’orchestre leur sensibilité musicale, leur bonheur musical.
Une surprise : ils ne seront finalement que quatre à disputer le tour final du Concours, Vladimir Ashkenazy précisant que seuls les membres de ce quatuor avaient obtenu la majorité nécessaire des voix. Un effet positif de cette réduction de l’effectif est que chacun des candidats disposera d’une heure et quart, ce samedi 26 mai, pour faire valoir ses qualités de chef.
Les finalistes seront donc, dans leur ordre de passage :
- Roberto Forés Veses (Espagne, 36 ans)
- Rossen Gergov (Bulgarie, 26 ans)
- Deborah Waldman (Israël-Brésil, 29 ans)
- Benjamin Ellin (Royaume-Uni, 27 ans)
Stéphane Gilbart
Une surprise : ils ne seront finalement que quatre à disputer le tour final du Concours, Vladimir Ashkenazy précisant que seuls les membres de ce quatuor avaient obtenu la majorité nécessaire des voix. Un effet positif de cette réduction de l’effectif est que chacun des candidats disposera d’une heure et quart, ce samedi 26 mai, pour faire valoir ses qualités de chef.
Les finalistes seront donc, dans leur ordre de passage :
- Roberto Forés Veses (Espagne, 36 ans)
- Rossen Gergov (Bulgarie, 26 ans)
- Deborah Waldman (Israël-Brésil, 29 ans)
- Benjamin Ellin (Royaume-Uni, 27 ans)
Stéphane Gilbart
D’intéressantes obligations
D’intéressantes obligations
Qui dit deuxième tour du Concours Evgeny Svetlanov dit nouvelles œuvres imposées. Et il nous faut saluer le choix de René Koering, le directeur artistique : ce qu’il impose aux candidats, ce sont d’intéressantes obligations !
Lors du premier tour déjà, nous avons souligné combien les symphonies de Beethoven étaient les bienvenues pour évaluer quelques aspects des qualités musicales et techniques des candidats.
Pour le deuxième tour, Piotr Illitch Tchaïkovski ou Bela Bartok et Evgeny Svetlanov sont au programme. Un membre du Jury nous a confié regretter l’absence d’un Stravinsky par exemple, considéré comme un impitoyable « juge technique » !
Dans les premiers mouvements des symphonies n°1 – Rêves durant un voyage d’hiver - et n°2 – Petite Russienne - de Tchaïkovski, les chefs doivent tenir compte de nombreuses interventions solistes (flûte, basson, clarinette, cor) dont la qualité de la « présence » ou du chant est essentielle au climat des pièces, soigner la manière dont les cordes, par exemple, viennent les soutenir, la façon dont l’orchestre tout entier « escalade » un crescendo qui explose en fanfare aux cuivres et aux bois. L’orchestre doit chanter, pleurer, rugir, être lyrique ou davantage géométrique. « Il y a de quoi faire », madame (nous reviendrons sur cette solitude) et messieurs les candidats ! Quant à la Suite de danses de Bartok, elle confronte au fameux « folklore imaginaire » du compositeur hongrois : si les sources en effet sont populaires, elles sont merveilleusement transcendées, toujours présentes mais à la manière d’un esprit nourricier, nécessaires pour qu’« autre chose » advienne.
L’Aube sur les champs d’Evgeny Svetlanov est une œuvre charmante – et ce terme doit être pris dans son sens le plus positif d’envoûtement. Quelle belle atmosphère que celle de ce jour qui point et que nous annonce la clarinette, de ce soleil qui jaillit et s’impose triomphalement – et l’orchestre de chanter. Le chef doit nous faire réellement entendre ce qui nous permettra de voir et de ressentir.
*
Petit détail technique et pratique : depuis ce matin, une caméra et des écrans de télévision placés devant leur siège permettent aux membres du Jury de juger les candidats verso et recto !
*
Kaspar Zehnder (Suisse, 37 ans) est donc le premier à interpréter la pièce d’Evgeny Svetlanov. Il nous en fait bien ressentir le caractère à la fois impressionniste, et romantique dans cette effusion du soleil qui triomphe. Il nous fait entendre, pour la première fois, les oiseaux posés sur les lignes des portées… Ses mouvements de la Suite de danses de Bartok nous confirment qu’il a de l’expérience et du métier ; il est en effet l’un des deux candidats les plus âgés et a déjà connu de nombreux engagements à la tête d’orchestres. Très calme dans sa direction, le geste naturellement ample dans les moments du chant, extrêmement précis dans des indications corporelles qu’il ne galvaude pas (ses mouvements ne sont jamais « décoratifs »), décomposant et retravaillant les passages les plus délicats, il obtient une belle réponse d’un orchestre qu’il semble apprécier.
Yukihiro Notsu (Japon, 30 ans) a choisi le premier mouvement de la deuxième symphonie de Tchaïkovski. Il mène son orchestre d’une baguette souple, ses gestes ne sont jamais « carrés ». Il est aussi retenu dans son attitude que dans son interprétation. Il se veut plus musicien que technicien et n’est pas l’homme des déchaînements passionnés.
Roberto Forés Veses (Espagne, 36 ans) manifeste, dans le Svetlanov, une douceur contenue, et le soleil qu’il fait naître est plutôt un soleil d’automne. Il a lui aussi choisi le premier mouvement de la deuxième symphonie de Tchaïkovski. Se servant peu de sa main gauche, il n’en parvient pas moins à faire preuve d’une réelle musicalité. Il s’affirme au cours de sa prestation.
Jean-Luc Tingaud (France, 37 ans) donne belle vie à L’Aube sur les champs dont il fait bien apparaître, après avoir en avoir repris quelques passages, les différentes atmosphères, les couleurs. Il « tisse » son interprétation du Bartok, très attentif par exemple à l’exactitude du développement d’un crescendo, émouvant dans la partie lente, dansée, du mouvement, nous ramenant ainsi, avec légèreté, à sa source populaire. A la fin de sa prestation, « Bien ! », dit-il, dans un soupir-sourire.
Alexey Osetrov (Russie, 34 ans) paraît moins à l’aise dans les pièces de ce second tour que dans le Beethoven du premier. Il soigne le chant du Svetlanov, nous fait bien entendre ses différents plans et – il aime ça – déchaîne la puissance de l’orchestre, comme si le soleil, un matin, décidait qu’il irait directement de l’aube à midi ! Dans le premier mouvement de la première symphonie de Tchaïkovski, il semble surpris du contraste entre ce qu’il avait sans doute prévu comme travail et la réalité de ce que l’orchestre lui propose. Sa direction se fait plus nerveuse, ainsi que le prouvent les coups de baguette sur le pupitre. Et alors que, pour le Beethoven, il avait décidé de quitter le plateau avant la limite prévue pour sa prestation, il exige, cette fois, de disposer de tout son temps.
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber
Qui dit deuxième tour du Concours Evgeny Svetlanov dit nouvelles œuvres imposées. Et il nous faut saluer le choix de René Koering, le directeur artistique : ce qu’il impose aux candidats, ce sont d’intéressantes obligations !
Lors du premier tour déjà, nous avons souligné combien les symphonies de Beethoven étaient les bienvenues pour évaluer quelques aspects des qualités musicales et techniques des candidats.
Pour le deuxième tour, Piotr Illitch Tchaïkovski ou Bela Bartok et Evgeny Svetlanov sont au programme. Un membre du Jury nous a confié regretter l’absence d’un Stravinsky par exemple, considéré comme un impitoyable « juge technique » !
Dans les premiers mouvements des symphonies n°1 – Rêves durant un voyage d’hiver - et n°2 – Petite Russienne - de Tchaïkovski, les chefs doivent tenir compte de nombreuses interventions solistes (flûte, basson, clarinette, cor) dont la qualité de la « présence » ou du chant est essentielle au climat des pièces, soigner la manière dont les cordes, par exemple, viennent les soutenir, la façon dont l’orchestre tout entier « escalade » un crescendo qui explose en fanfare aux cuivres et aux bois. L’orchestre doit chanter, pleurer, rugir, être lyrique ou davantage géométrique. « Il y a de quoi faire », madame (nous reviendrons sur cette solitude) et messieurs les candidats ! Quant à la Suite de danses de Bartok, elle confronte au fameux « folklore imaginaire » du compositeur hongrois : si les sources en effet sont populaires, elles sont merveilleusement transcendées, toujours présentes mais à la manière d’un esprit nourricier, nécessaires pour qu’« autre chose » advienne.
L’Aube sur les champs d’Evgeny Svetlanov est une œuvre charmante – et ce terme doit être pris dans son sens le plus positif d’envoûtement. Quelle belle atmosphère que celle de ce jour qui point et que nous annonce la clarinette, de ce soleil qui jaillit et s’impose triomphalement – et l’orchestre de chanter. Le chef doit nous faire réellement entendre ce qui nous permettra de voir et de ressentir.
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Petit détail technique et pratique : depuis ce matin, une caméra et des écrans de télévision placés devant leur siège permettent aux membres du Jury de juger les candidats verso et recto !
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Kaspar Zehnder (Suisse, 37 ans) est donc le premier à interpréter la pièce d’Evgeny Svetlanov. Il nous en fait bien ressentir le caractère à la fois impressionniste, et romantique dans cette effusion du soleil qui triomphe. Il nous fait entendre, pour la première fois, les oiseaux posés sur les lignes des portées… Ses mouvements de la Suite de danses de Bartok nous confirment qu’il a de l’expérience et du métier ; il est en effet l’un des deux candidats les plus âgés et a déjà connu de nombreux engagements à la tête d’orchestres. Très calme dans sa direction, le geste naturellement ample dans les moments du chant, extrêmement précis dans des indications corporelles qu’il ne galvaude pas (ses mouvements ne sont jamais « décoratifs »), décomposant et retravaillant les passages les plus délicats, il obtient une belle réponse d’un orchestre qu’il semble apprécier.
Yukihiro Notsu (Japon, 30 ans) a choisi le premier mouvement de la deuxième symphonie de Tchaïkovski. Il mène son orchestre d’une baguette souple, ses gestes ne sont jamais « carrés ». Il est aussi retenu dans son attitude que dans son interprétation. Il se veut plus musicien que technicien et n’est pas l’homme des déchaînements passionnés.
Roberto Forés Veses (Espagne, 36 ans) manifeste, dans le Svetlanov, une douceur contenue, et le soleil qu’il fait naître est plutôt un soleil d’automne. Il a lui aussi choisi le premier mouvement de la deuxième symphonie de Tchaïkovski. Se servant peu de sa main gauche, il n’en parvient pas moins à faire preuve d’une réelle musicalité. Il s’affirme au cours de sa prestation.
Jean-Luc Tingaud (France, 37 ans) donne belle vie à L’Aube sur les champs dont il fait bien apparaître, après avoir en avoir repris quelques passages, les différentes atmosphères, les couleurs. Il « tisse » son interprétation du Bartok, très attentif par exemple à l’exactitude du développement d’un crescendo, émouvant dans la partie lente, dansée, du mouvement, nous ramenant ainsi, avec légèreté, à sa source populaire. A la fin de sa prestation, « Bien ! », dit-il, dans un soupir-sourire.
Alexey Osetrov (Russie, 34 ans) paraît moins à l’aise dans les pièces de ce second tour que dans le Beethoven du premier. Il soigne le chant du Svetlanov, nous fait bien entendre ses différents plans et – il aime ça – déchaîne la puissance de l’orchestre, comme si le soleil, un matin, décidait qu’il irait directement de l’aube à midi ! Dans le premier mouvement de la première symphonie de Tchaïkovski, il semble surpris du contraste entre ce qu’il avait sans doute prévu comme travail et la réalité de ce que l’orchestre lui propose. Sa direction se fait plus nerveuse, ainsi que le prouvent les coups de baguette sur le pupitre. Et alors que, pour le Beethoven, il avait décidé de quitter le plateau avant la limite prévue pour sa prestation, il exige, cette fois, de disposer de tout son temps.
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber
24 May 2007
О чувствах и надеждах
Всякого московского (не говоря уже о российском) человека поразит Люксембургская консерватория, где проходят прослушивания 1 и 2 туров. Такой замок – современный и уютный одновременно. Эх, нашим бы бедным гениальным студентам такой! Рай, только что не с висячими садами (сады для Люксембурга вообще очень характерны). Закрадывается, однако, сомнение, что учреждение полностью оправдывает привычное для нас понимание слова «консерватория». Из-за дверей классов доносятся звуки примитивных сочинений в корявых интерпретациях. В общем, как наше училище, скорее даже музыкалка.
Но это-то ладно; гораздо обиднее, что студенты на конкурс дирижеров не ходят – в отличие от того, как это было бы в Москве, где такие посещения являются, можно сказать, частью учебного процесса.
Тем более такая редкость – конкурс ДИРИЖЕРОВ. Это же пойди собери его по косточкам. В жюри сплошь очень занятые люди, председателя Владимира Ашкенази, человека мало что гениального, так еще и милейшего ждут на всем свете; тяжело работает шикарный оркестр, да и сами конкурсанты по определению люди непростые, резко-штучно-индивидуальные.
К середине второго тура возникает много раздумий вокруг неразрешенного вопроса: а существует ли дирижерская техника? Ведь общее у всех конкурсантов только то, что они дирижируют руками, а не ногами.
Впрочем, Денис Прощаев (на второй тур не прошел; представлял Украину, а живет, как выяснилось из разговора, в Германии; как пианист учился у Крайнева в Ганновере) раздражил жюри некоторой танцевальностью движений. Так, к ярким (очень ярким) кульминациям он подходил, постепенно поднимаясь из полуприседа. Ну и что? Не нравится – не смотрите. Жаль, что на втором туре я не услышу этого тонкого музыканта и не увижу эту колоритную фигуру.
Некоторое отношение к Украине имела и француженка Надя Васютек (из семьи эмигрантов), украсившая конкурс скорее эстетически (симпатичная блондинка с длинными волосами).
В противополжность ей один из самых зрелых участников – 37-летний швейцарец Каспар Зендер. Вообще непонятно, что он делает на этом конкурсе и с кем, собственно, соревнуется. Он крепкий, надеждный мастер, но... может быть, не более того?
Второй тур он открыл не приживающимся в России Бартоком – «Танцевальной сюитой», эффектно нажал на все пружины гениального сочинения. Дальше – обязательный «Рассвет в поле» Светланова. Хорошо было слышно, что автор отлично знал, что из какого инструмента в оркестре можно выжать, как создать точную оркестровую краску. Понравилось, как Зендер интригующе подходит к тутти. Больше ничем не привлек, хотя и этого немало.
Японец Юкихиро Нотсу (30 лет) после волевого Зендера для слушателя и вовсе потерялся, да и начало Второй симфонии Чайковского в его интерпретации, несмотря на современную драйвовость, ничего не передало из наших тонких русских «чуйств», уж кому это знать как не российским критикам.
И на первом, и на втором турах захватывающее впечатление произвел 36-летний испанец Роберто Форес Весес, судя по послужному списку, очень опытный музыкант. Но очень свежий. Техника у него своеобразная (если она все-таки есть), и это тем более подтверждает, что главное - сохранение коммуникативной (передавательной) функции, а жесты… ну что жесты, это как походка, одному Бог дал красивую, другому корявую, одному плавную, другому энергичную. У Роберто мощнейший «Рассвет», можно сказать, в духе Мусоргского, которого он, может быть, даже слышал, т.к. производит впечатление очень культурного музыканта.
Захватило и начало Второй симфонии Чайковского (каждый конкурсант должен уложиться в полчаса). В отличие от ее прежних исполнений на конкурсе, она уже не показалась такой какой-то салонно-дилетантской музыкой, которую можно дирижировать только из снисхождения к великому бренду – имени Чайковского. Пошловатая на современный вкус тема обернулась пронзительной мольбой. Очень выразительны и будто бы не случайны были контрасты.
37-летний француз Жан-Люк Тэнго своеобразен чрезвычайно – хотя бы своей резкостью и в жестах, и даже в интонациях, с которыми он делает замечания оркестрантам. Но вот уж что-что – а решительность дирижеру никогда не помешает.
Педагогом Тэнго был Мануэль Розенталь – ученик самого Равеля. А потому то ли казалось, то ли так и было - «Рассвет» как-то очень походил на «Матушку Гусыню», и это была отдельная забава. Но в целом такой тип дирижера импонирует куда больше, чем какой-нибудь размазня.
Из трех русских участников – 25-летнего геликоновца Константина Чудовского, 30-летнего Василия Валитова и 34-летнего Алексея Осетрова (этот тоже известен по «Геликону» - только там и дают хоть как-то прорваться молодым дирижерам) – на второй тур прошел только последний. Осетров – ученик Рождественского, что видно даже невооруженным взглядом, когда он, дирижируя правой рукой, левую ставит вбок.
На втором туре перед жюри стоят цветные мониторы – чтобы смотреть на дирижера, так сказать, анфас, а не сзади. И Осетров иногда смешно закусывает правый кулак, в отчаянии, что ли. Но тогда это хорошее отчаяние, творческое. Кажется, он интроверт, и есть приятное впечатление, что старается сказать нечто новое, важное. Ну не комедию же он ломает, в конце концов?
Алексей готовый мастер с перспективой – а приткнуться в Москве всерьез негде, кто ж этого не знает. Конечно, его «Рассвет» был лучшим, кто бы сомневался. Уф, наконец-то наш, русский рассвет, а не люксембургский закат и не заря над островом Хонсю. Душевный, трогательный.
Осетрову выпало еще начало Первой симфонии Чайковского. Он играет ее в наших традициях. И мне кажется, ему определенно что-то светит. Жаль, нет возможности сыграть всю симфонию целиком – и это минус конкурса, потому что есть музыканты, более склонные объять все сочинение в целом, а не вытютюкивать его отдельные такты.
Как мне нравится, что жюри тут хлопает конкурсантам. Причем с разной интенсивностью, т.е. не соблюдая приличия.
Кого еще с нетерпением жду на втором туре? (Если, конечно, после сегодняшнего визита Путина весь Люксембург не закроют к чертовой матери).
Конечно, болгарина Россена Гергова. Ему 26 лет, питомец Сейджи Озавы, ничего себе. Как залудил Бетховена на первом туре – будто все в другом месте вдруг оказались, такой пошел недетский «бетховенский» звук!
И еще одна моя личная любимица – Дебора Вальдман (Бразилия-Израиль), ассистентка Мазура, ну, крошка, 29 лет, а вид аккуратного тинейджера. А характер-то! Особенно мне понравилось, что, когда на 1 туре ее остановили (время вышло), она мужественно и одновременно по-музыкантски гордо доиграла свою бетховенскую фразу до конца. Мужики в таких случаях тут просто опускают палочку, на пол-звуке обрывают оркестр и понуро бредут со сцены.
Конечно, первые места дамам в нашем безобразном мире не светят. Но каков пример! Такая женщина не бросит коня на скаку, а сама домчит на нем к одним только ей известным вершинам.
Особое впечатление – Филармонический оркестр Люксембурга (замечу, кстати, в скобках, что в концертном зале Консерватории отличная акустика). Конкурс вклинился в его концертную деятельность, и тем не менее оркестранты выкладываются, исполняя все не только желания, но и прихоти дрожащих от ужаса участников. Порой подхихикивая в сторонку, что не отражается на качестве игры. Возможно, в перерывах, за чашечкой кофе и с видом на живописные люксембургские пригорки, оркестранты называют своих молодых мучителей придурками. А то и покруче. Однако профессионализм, азарт художника и музыкантская солидарность в конце концов побеждают в них. И недаром им, измученным оркестрантам, в конце каждого дня прослушиваний жюри хлопает громче всех.
24.05.07 Наталья Зимянина
Но это-то ладно; гораздо обиднее, что студенты на конкурс дирижеров не ходят – в отличие от того, как это было бы в Москве, где такие посещения являются, можно сказать, частью учебного процесса.
Тем более такая редкость – конкурс ДИРИЖЕРОВ. Это же пойди собери его по косточкам. В жюри сплошь очень занятые люди, председателя Владимира Ашкенази, человека мало что гениального, так еще и милейшего ждут на всем свете; тяжело работает шикарный оркестр, да и сами конкурсанты по определению люди непростые, резко-штучно-индивидуальные.
К середине второго тура возникает много раздумий вокруг неразрешенного вопроса: а существует ли дирижерская техника? Ведь общее у всех конкурсантов только то, что они дирижируют руками, а не ногами.
Впрочем, Денис Прощаев (на второй тур не прошел; представлял Украину, а живет, как выяснилось из разговора, в Германии; как пианист учился у Крайнева в Ганновере) раздражил жюри некоторой танцевальностью движений. Так, к ярким (очень ярким) кульминациям он подходил, постепенно поднимаясь из полуприседа. Ну и что? Не нравится – не смотрите. Жаль, что на втором туре я не услышу этого тонкого музыканта и не увижу эту колоритную фигуру.
Некоторое отношение к Украине имела и француженка Надя Васютек (из семьи эмигрантов), украсившая конкурс скорее эстетически (симпатичная блондинка с длинными волосами).
В противополжность ей один из самых зрелых участников – 37-летний швейцарец Каспар Зендер. Вообще непонятно, что он делает на этом конкурсе и с кем, собственно, соревнуется. Он крепкий, надеждный мастер, но... может быть, не более того?
Второй тур он открыл не приживающимся в России Бартоком – «Танцевальной сюитой», эффектно нажал на все пружины гениального сочинения. Дальше – обязательный «Рассвет в поле» Светланова. Хорошо было слышно, что автор отлично знал, что из какого инструмента в оркестре можно выжать, как создать точную оркестровую краску. Понравилось, как Зендер интригующе подходит к тутти. Больше ничем не привлек, хотя и этого немало.
Японец Юкихиро Нотсу (30 лет) после волевого Зендера для слушателя и вовсе потерялся, да и начало Второй симфонии Чайковского в его интерпретации, несмотря на современную драйвовость, ничего не передало из наших тонких русских «чуйств», уж кому это знать как не российским критикам.
И на первом, и на втором турах захватывающее впечатление произвел 36-летний испанец Роберто Форес Весес, судя по послужному списку, очень опытный музыкант. Но очень свежий. Техника у него своеобразная (если она все-таки есть), и это тем более подтверждает, что главное - сохранение коммуникативной (передавательной) функции, а жесты… ну что жесты, это как походка, одному Бог дал красивую, другому корявую, одному плавную, другому энергичную. У Роберто мощнейший «Рассвет», можно сказать, в духе Мусоргского, которого он, может быть, даже слышал, т.к. производит впечатление очень культурного музыканта.
Захватило и начало Второй симфонии Чайковского (каждый конкурсант должен уложиться в полчаса). В отличие от ее прежних исполнений на конкурсе, она уже не показалась такой какой-то салонно-дилетантской музыкой, которую можно дирижировать только из снисхождения к великому бренду – имени Чайковского. Пошловатая на современный вкус тема обернулась пронзительной мольбой. Очень выразительны и будто бы не случайны были контрасты.
37-летний француз Жан-Люк Тэнго своеобразен чрезвычайно – хотя бы своей резкостью и в жестах, и даже в интонациях, с которыми он делает замечания оркестрантам. Но вот уж что-что – а решительность дирижеру никогда не помешает.
Педагогом Тэнго был Мануэль Розенталь – ученик самого Равеля. А потому то ли казалось, то ли так и было - «Рассвет» как-то очень походил на «Матушку Гусыню», и это была отдельная забава. Но в целом такой тип дирижера импонирует куда больше, чем какой-нибудь размазня.
Из трех русских участников – 25-летнего геликоновца Константина Чудовского, 30-летнего Василия Валитова и 34-летнего Алексея Осетрова (этот тоже известен по «Геликону» - только там и дают хоть как-то прорваться молодым дирижерам) – на второй тур прошел только последний. Осетров – ученик Рождественского, что видно даже невооруженным взглядом, когда он, дирижируя правой рукой, левую ставит вбок.
На втором туре перед жюри стоят цветные мониторы – чтобы смотреть на дирижера, так сказать, анфас, а не сзади. И Осетров иногда смешно закусывает правый кулак, в отчаянии, что ли. Но тогда это хорошее отчаяние, творческое. Кажется, он интроверт, и есть приятное впечатление, что старается сказать нечто новое, важное. Ну не комедию же он ломает, в конце концов?
Алексей готовый мастер с перспективой – а приткнуться в Москве всерьез негде, кто ж этого не знает. Конечно, его «Рассвет» был лучшим, кто бы сомневался. Уф, наконец-то наш, русский рассвет, а не люксембургский закат и не заря над островом Хонсю. Душевный, трогательный.
Осетрову выпало еще начало Первой симфонии Чайковского. Он играет ее в наших традициях. И мне кажется, ему определенно что-то светит. Жаль, нет возможности сыграть всю симфонию целиком – и это минус конкурса, потому что есть музыканты, более склонные объять все сочинение в целом, а не вытютюкивать его отдельные такты.
Как мне нравится, что жюри тут хлопает конкурсантам. Причем с разной интенсивностью, т.е. не соблюдая приличия.
Кого еще с нетерпением жду на втором туре? (Если, конечно, после сегодняшнего визита Путина весь Люксембург не закроют к чертовой матери).
Конечно, болгарина Россена Гергова. Ему 26 лет, питомец Сейджи Озавы, ничего себе. Как залудил Бетховена на первом туре – будто все в другом месте вдруг оказались, такой пошел недетский «бетховенский» звук!
И еще одна моя личная любимица – Дебора Вальдман (Бразилия-Израиль), ассистентка Мазура, ну, крошка, 29 лет, а вид аккуратного тинейджера. А характер-то! Особенно мне понравилось, что, когда на 1 туре ее остановили (время вышло), она мужественно и одновременно по-музыкантски гордо доиграла свою бетховенскую фразу до конца. Мужики в таких случаях тут просто опускают палочку, на пол-звуке обрывают оркестр и понуро бредут со сцены.
Конечно, первые места дамам в нашем безобразном мире не светят. Но каков пример! Такая женщина не бросит коня на скаку, а сама домчит на нем к одним только ей известным вершинам.
Особое впечатление – Филармонический оркестр Люксембурга (замечу, кстати, в скобках, что в концертном зале Консерватории отличная акустика). Конкурс вклинился в его концертную деятельность, и тем не менее оркестранты выкладываются, исполняя все не только желания, но и прихоти дрожащих от ужаса участников. Порой подхихикивая в сторонку, что не отражается на качестве игры. Возможно, в перерывах, за чашечкой кофе и с видом на живописные люксембургские пригорки, оркестранты называют своих молодых мучителей придурками. А то и покруче. Однако профессионализм, азарт художника и музыкантская солидарность в конце концов побеждают в них. И недаром им, измученным оркестрантам, в конце каждого дня прослушиваний жюри хлопает громче всех.
24.05.07 Наталья Зимянина
23 May 2007
Nous les retrouverons au second tour
Ce mercredi 23 mai, après avoir entendu les quatre derniers candidats du premier tour des éliminatoires, le Jury s’est retiré pour délibérer. Assez rapidement, il est revenu communiquer les noms des dix candidats retenus pour le second tour, une liste sans réelle surprise au vu et à l’écoute des prestations successives.
Les « élus » dans l’ordre de leur futur passage :
1- Kaspar Zehnder (Suisse)
2- Yukihiro Notsu (Japon)
3- Roberto Forés Veses (Espagne)
4- Jean-Luc Tingaud (France)
5- Alexey Osetrov (Russe)
6- Ivan Arboleya-Montes (Espagne)
7- Rossen Gergov (Bulgarie)
8- Debora Waldman (Israël-Brésil)
9- Sasha Mäkilä (Finlande)
10- Benjamin Ellin (Royaume-Uni)
Stéphane Gilbart
Les « élus » dans l’ordre de leur futur passage :
1- Kaspar Zehnder (Suisse)
2- Yukihiro Notsu (Japon)
3- Roberto Forés Veses (Espagne)
4- Jean-Luc Tingaud (France)
5- Alexey Osetrov (Russe)
6- Ivan Arboleya-Montes (Espagne)
7- Rossen Gergov (Bulgarie)
8- Debora Waldman (Israël-Brésil)
9- Sasha Mäkilä (Finlande)
10- Benjamin Ellin (Royaume-Uni)
Stéphane Gilbart
L’impossible portrait-robot
Dans les petites (ou monumentales) annonces d’offres d’emploi, nous découvrons le plus souvent ce que l’on appelle une « Job description », c’est-à-dire le profil de formation, de diplômes, de compétences et de références en tous genres nécessaires pour espérer obtenir l’emploi. Dans une enquête policière, pour retrouver un suspect, l’on recourt au portrait-robot, qui permet de préciser, d’affiner les recherches. Existe-t-il une « job description », un portrait-robot pour l’emploi de chef d’orchestre ?
Les trois premières journées du Concours Evgeny Svetlanov nous ont permis de découvrir dix-huit candidats, et le moins qu’on puisse dire, est que le « chef d’orchestre » n’appartient pas à un « type » strictement défini, dont on connaîtrait et maîtriserait toutes les caractéristiques !
L’âge ? Le plus jeune a vingt-quatre ans, les deux plus âgés trente-sept. L’origine nationale ? Comme nous l’avons déjà signalé, ils viennent d’un peu partout. La formation ? Elle aussi est multiple, certains candidats la prolongeant et la diversifiant chez des maîtres eux-mêmes de toutes origines, conceptions et préférences musicales. Le physique ? Il y a des petits secs, des enveloppés, des grands baraqués ou des maigres. L’uniforme ? Chemise et pantalon noirs sont plutôt privilégiés. Le caractère ? Certains sont du genre agité, d’autres étonnamment placides. Impossible portrait-robot donc ?
Non, pas exactement, car tous, quand ils nous « accrochent », quand ils nous convainquent, quand ils nous émeuvent, manifestent un certain charisme – qui n’est pas extraversion, mais qui ressortit d’une mystérieuse « présence ». Tous ont une grande expressivité, une remarquable précision dans leurs jeux corporel, gestuel et mimique : les regarder, c’est souvent comprendre ce qu’ils veulent, voir à qui ils donnent le son et ce qu’ils désirent obtenir comme réponse, ou ce qu’ils font comme proposition. Tous sont « musiciens », et ce mot n’est pas un pléonasme : ils nous font réellement entendre ce que peut receler une partition, ce qu’ils y ont ressenti et trouvé, ce qu’ils veulent partager.
*
Et comment donc les candidats de ce mercredi 23 mai nous sont-ils apparus ?
Rossen Gergov (Bulgarie, 26 ans) – premier mouvement de la septième symphonie – a de très beaux gestes, amples, maîtrisés, qui clarifient son propos. Il progresse tranquillement dans son interprétation. Il dialogue avec des membres de l’orchestre (passant de l’anglais au français), leur donne des indications orales en continuant à diriger, est demandeur d’une lecture « brillante » de la partition. L’orchestre le comprend, comme en témoigne l’évolution des reprises.
Alexey Osetrov (Russie, 34 ans) – premier mouvement de la troisième symphonie – ne parle pas, lui : il dirige le mouvement, sans interruption, jusqu’à son terme. Pour caractériser sa prestation, nous reprendrons les mots du Maestro : « Un chef doit transmettre sa volonté à un orchestre par le geste, le regard et le mimétisme. Il doit transmettre une impulsion de volonté et d’énergie. Les paroles prononcées doivent être réduites autant que possible ». Le mouvement terminé, et alors que son temps de passage n’est pas épuisé, tâche accomplie, Alexey Osetrov quitte le plateau.
Vasily Valitov (Russie, 30 ans) – premier mouvement de la troisième symphonie – tire profit de la disponibilité d’un orchestre très à l’aise, au presque terme de la première phase des éliminatoires, dans les partitions beethovéniennes. Il alterne parcours d’ensemble et révision de points de détail.
Kaspar Zehnder (Suisse, 37 ans) – premier mouvement de la troisième symphonie – a déjà du métier. Bien calé sur ses jambes, le geste mesuré mais extrêmement net, il attaque le mouvement à vive allure, sans rien perdre pourtant des nuances ni de la clarté. Soucieux des intonations des différents pupitres, il les fait travailler séparément et il nous confirme alors que c’est du souci des détails que naît la réussite de l’ensemble.
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber
Les trois premières journées du Concours Evgeny Svetlanov nous ont permis de découvrir dix-huit candidats, et le moins qu’on puisse dire, est que le « chef d’orchestre » n’appartient pas à un « type » strictement défini, dont on connaîtrait et maîtriserait toutes les caractéristiques !
L’âge ? Le plus jeune a vingt-quatre ans, les deux plus âgés trente-sept. L’origine nationale ? Comme nous l’avons déjà signalé, ils viennent d’un peu partout. La formation ? Elle aussi est multiple, certains candidats la prolongeant et la diversifiant chez des maîtres eux-mêmes de toutes origines, conceptions et préférences musicales. Le physique ? Il y a des petits secs, des enveloppés, des grands baraqués ou des maigres. L’uniforme ? Chemise et pantalon noirs sont plutôt privilégiés. Le caractère ? Certains sont du genre agité, d’autres étonnamment placides. Impossible portrait-robot donc ?
Non, pas exactement, car tous, quand ils nous « accrochent », quand ils nous convainquent, quand ils nous émeuvent, manifestent un certain charisme – qui n’est pas extraversion, mais qui ressortit d’une mystérieuse « présence ». Tous ont une grande expressivité, une remarquable précision dans leurs jeux corporel, gestuel et mimique : les regarder, c’est souvent comprendre ce qu’ils veulent, voir à qui ils donnent le son et ce qu’ils désirent obtenir comme réponse, ou ce qu’ils font comme proposition. Tous sont « musiciens », et ce mot n’est pas un pléonasme : ils nous font réellement entendre ce que peut receler une partition, ce qu’ils y ont ressenti et trouvé, ce qu’ils veulent partager.
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Et comment donc les candidats de ce mercredi 23 mai nous sont-ils apparus ?
Rossen Gergov (Bulgarie, 26 ans) – premier mouvement de la septième symphonie – a de très beaux gestes, amples, maîtrisés, qui clarifient son propos. Il progresse tranquillement dans son interprétation. Il dialogue avec des membres de l’orchestre (passant de l’anglais au français), leur donne des indications orales en continuant à diriger, est demandeur d’une lecture « brillante » de la partition. L’orchestre le comprend, comme en témoigne l’évolution des reprises.
Alexey Osetrov (Russie, 34 ans) – premier mouvement de la troisième symphonie – ne parle pas, lui : il dirige le mouvement, sans interruption, jusqu’à son terme. Pour caractériser sa prestation, nous reprendrons les mots du Maestro : « Un chef doit transmettre sa volonté à un orchestre par le geste, le regard et le mimétisme. Il doit transmettre une impulsion de volonté et d’énergie. Les paroles prononcées doivent être réduites autant que possible ». Le mouvement terminé, et alors que son temps de passage n’est pas épuisé, tâche accomplie, Alexey Osetrov quitte le plateau.
Vasily Valitov (Russie, 30 ans) – premier mouvement de la troisième symphonie – tire profit de la disponibilité d’un orchestre très à l’aise, au presque terme de la première phase des éliminatoires, dans les partitions beethovéniennes. Il alterne parcours d’ensemble et révision de points de détail.
Kaspar Zehnder (Suisse, 37 ans) – premier mouvement de la troisième symphonie – a déjà du métier. Bien calé sur ses jambes, le geste mesuré mais extrêmement net, il attaque le mouvement à vive allure, sans rien perdre pourtant des nuances ni de la clarté. Soucieux des intonations des différents pupitres, il les fait travailler séparément et il nous confirme alors que c’est du souci des détails que naît la réussite de l’ensemble.
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber
Labels: Mercredi 23 mai 2007
Beethoven ne sera pas mondialisé !
« Mondialisation » est un mot qui en inquiète beaucoup, synonyme qu’il est pour eux de réduction à un plus petit commun dénominateur (le plus souvent mercantile), de rabotage, de perte d’identité, d’uniformisation. Eh bien, au Concours Svetlanov, Beethoven n’a rien à craindre, il ne sera pas mondialisé !
Evidemment, on pourrait croire que le premier antidote au mal craint est tout simplement l’origine nationale des candidats. Ils viennent en effet d’un peu partout, d’Espagne et du Japon, de Bulgarie et d’Israël, de Finlande et de Suisse, et de bien d’autres latitudes et longitudes encore de notre planète. Mais le raisonnement n’est pas aussi logique ni juste qu’il en a l’air : le Japonais a poursuivi une spécialisation de haut niveau en Finlande, le Bulgare s’est formé en Autriche, beaucoup ont été les disciples de tel ou tel même grand chef. Ils appartiennent donc à des écoles, à des systèmes, à des réseaux qui pourraient les « formater ».
Mais nous sommes dans le domaine de l’art et plus précisément dans celui de l’interprétation. Beethoven, lui-même, nous offre une œuvre définitivement « ouverte ». Même si on lui reconnaît « un sens », même si elle installe une atmosphère, elle est telle que chacun de ses interprètes, sans la trahir, peut l’investir et la nourrir de sa propre personnalité, peut « l’accomplir ». Et les candidats nous le prouvent : ils ne se réduisent pas à leur origine nationale ou aux contours de leur formation, ils expriment un tempérament, ils nous disent leur rapport à l’œuvre et à l’orchestre, ils possèdent leur langage corporel et gestuel, et ce que chacun nous propose, c’est un Beethoven original, chaque fois « ni tout à fait le même ni tout à fait un autre » !
*
En voici les preuves concrètes apportées par les candidats de ce mardi 22 mai.
Cyril Englebert (Belgique, 24 ans) – premier mouvement de la cinquième symphonie. Ses gestes, très précis, ont une belle ampleur et sont vraiment explicites. Sûr de lui, « souverain » dans sa conduite, maîtrisant les variations d’intensités (jolies montées en crescendo), il nous offre un Beethoven romantique mais sans mièvrerie. Avec un orchestre qu’il a manifestement subjugué, ce jeune chef propose une vision globale cohérente du morceau, dont il reviendra, par la suite, préciser des détails.
Sasha Mäkilä (Finlande, 34 ans) – premier mouvement de la septième symphonie – est un conducteur raffiné (ses gestes sont déliés), à la présence affirmée (ainsi, on note le contraste entre son apparence chétive et la vigueur de sa parole ; on remarque le dynamisme qui émane de toute sa personne), à l’autorité réelle. Sur le plateau, il est chez lui : « Oh ! » s’exclame-t-il, déçu, quand le Jury l’interrompt.
Debora Waldman (Israël-Brésil, 29 ans) – premier mouvement de la cinquième symphonie – est « féminine » dans son élégance, sa gestuelle délicate, le délié de sa main gauche. Ses directives sont claires et, sollicitant parfois leur avis, elle mène un dialogue constructif avec les musiciens de l’orchestre. Elle exige d’eux la finesse qui la caractérise.
Jean-Luc Tingaud (France, 37 ans) – premier mouvement de la cinquième symphonie – interrompt rapidement l’orchestre pour expliquer longuement ce qu’il désire : il a pensé son interprétation. Ses commentaires révèlent aussi son désir de prouver combien il est attentif au rôle des différents pupitres. Quand il « se laisse aller », ses propositions ne manquent pas d’intérêt.
Benjamin Rous (Amérique, 29 ans) – premier mouvement de la septième symphonie – dirige sans partition. On remarque immédiatement la légèreté de ses gestes, le langage explicite de sa main gauche. Très consciencieux, il explique beaucoup. A la suite d’une reprise, il complimente un orchestre, qui lui est favorable.
En conclusion : c’est donc quatorze Beethoven que nous avons déjà rencontrés lors de ces deux premières séances. Encore quatre ce mercredi, avant les premiers choix du Jury !
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber
Evidemment, on pourrait croire que le premier antidote au mal craint est tout simplement l’origine nationale des candidats. Ils viennent en effet d’un peu partout, d’Espagne et du Japon, de Bulgarie et d’Israël, de Finlande et de Suisse, et de bien d’autres latitudes et longitudes encore de notre planète. Mais le raisonnement n’est pas aussi logique ni juste qu’il en a l’air : le Japonais a poursuivi une spécialisation de haut niveau en Finlande, le Bulgare s’est formé en Autriche, beaucoup ont été les disciples de tel ou tel même grand chef. Ils appartiennent donc à des écoles, à des systèmes, à des réseaux qui pourraient les « formater ».
Mais nous sommes dans le domaine de l’art et plus précisément dans celui de l’interprétation. Beethoven, lui-même, nous offre une œuvre définitivement « ouverte ». Même si on lui reconnaît « un sens », même si elle installe une atmosphère, elle est telle que chacun de ses interprètes, sans la trahir, peut l’investir et la nourrir de sa propre personnalité, peut « l’accomplir ». Et les candidats nous le prouvent : ils ne se réduisent pas à leur origine nationale ou aux contours de leur formation, ils expriment un tempérament, ils nous disent leur rapport à l’œuvre et à l’orchestre, ils possèdent leur langage corporel et gestuel, et ce que chacun nous propose, c’est un Beethoven original, chaque fois « ni tout à fait le même ni tout à fait un autre » !
*
En voici les preuves concrètes apportées par les candidats de ce mardi 22 mai.
Cyril Englebert (Belgique, 24 ans) – premier mouvement de la cinquième symphonie. Ses gestes, très précis, ont une belle ampleur et sont vraiment explicites. Sûr de lui, « souverain » dans sa conduite, maîtrisant les variations d’intensités (jolies montées en crescendo), il nous offre un Beethoven romantique mais sans mièvrerie. Avec un orchestre qu’il a manifestement subjugué, ce jeune chef propose une vision globale cohérente du morceau, dont il reviendra, par la suite, préciser des détails.
Sasha Mäkilä (Finlande, 34 ans) – premier mouvement de la septième symphonie – est un conducteur raffiné (ses gestes sont déliés), à la présence affirmée (ainsi, on note le contraste entre son apparence chétive et la vigueur de sa parole ; on remarque le dynamisme qui émane de toute sa personne), à l’autorité réelle. Sur le plateau, il est chez lui : « Oh ! » s’exclame-t-il, déçu, quand le Jury l’interrompt.
Debora Waldman (Israël-Brésil, 29 ans) – premier mouvement de la cinquième symphonie – est « féminine » dans son élégance, sa gestuelle délicate, le délié de sa main gauche. Ses directives sont claires et, sollicitant parfois leur avis, elle mène un dialogue constructif avec les musiciens de l’orchestre. Elle exige d’eux la finesse qui la caractérise.
Jean-Luc Tingaud (France, 37 ans) – premier mouvement de la cinquième symphonie – interrompt rapidement l’orchestre pour expliquer longuement ce qu’il désire : il a pensé son interprétation. Ses commentaires révèlent aussi son désir de prouver combien il est attentif au rôle des différents pupitres. Quand il « se laisse aller », ses propositions ne manquent pas d’intérêt.
Benjamin Rous (Amérique, 29 ans) – premier mouvement de la septième symphonie – dirige sans partition. On remarque immédiatement la légèreté de ses gestes, le langage explicite de sa main gauche. Très consciencieux, il explique beaucoup. A la suite d’une reprise, il complimente un orchestre, qui lui est favorable.
En conclusion : c’est donc quatorze Beethoven que nous avons déjà rencontrés lors de ces deux premières séances. Encore quatre ce mercredi, avant les premiers choix du Jury !
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber
22 May 2007
Une première journée, des Beethoven révélateurs, des moments de belle intensité !
Une première journée, des Beethoven révélateurs, des moments de belle intensité !
Les premiers battements de mesure du premier Concours International de Direction d’Orchestre Evgeny Svetlanov ont donc été donnés ce lundi matin, première journée des premières épreuves éliminatoires. C’est au Conservatoire de Luxembourg, dans une salle à la belle acoustique et très favorable à la convivialité musicale, que se sont fait entendre les premiers candidats.
Mais rappelons d’abord la composition du Jury : Vladimir Ashkenazy, aujourd’hui Directeur musical de l’Orchestre de la NHK, en est le Président. Ses membres : Rolf Beck, Intendant de l’Orchestre et du Chœur du NDR de Hambourg, Jean-Claude Casadesus, Directeur musical de l’Orchestre National de Lille, Paul Hughes, Directeur du BBC Symphony Orchestra à Londres, René Koering, Intendant de l’Orchestre et de l’Opéra de Montpellier, Alexander Müllenbach, compositeur, Lan Shui, Directeur musical du Singapore Symphony Orchestra, Alexander Vedernikov, Chef principal de l’Orchestre du Théâtre Bolshoï de Moscou et Elmar Weingarten, Directeur du Fonds Culturel de Berlin.
C’est à l’Orchestre Philharmonique de Luxembourg (OPL) que revient la belle et lourde charge d’être « l’outil de travail » des candidats. Ce lundi, il a déjà fait preuve de remarquables qualités d’« accompagnateur », avec une attention, un engagement, une souplesse, une endurance, une attention professionnelle et sympathique à leurs indications, qui ne peuvent être que profitables aux candidats.
Près de cent cinquante « dossiers » (curriculum vitae, cassette video, DVD) ont été adressés au Jury qui, après une première sélection, a retenu dix-huit candidats.
Lors du premier tour des éliminatoires (ces lundi 21, mardi 22 et mercredi 23 mai), les jeunes chefs disposent d’un temps de travail de vingt-cinq minutes. Il leur a été demandé de présenter le premier mouvement d’une symphonie de Beethoven : au choix, la troisième, la cinquième, la septième, des œuvres bienvenues pour se faire une première impression concrète des qualités musicales de leur lecture et d’interprétation, de leur personnalité et de leur conviction .
Ghun Kim (Américain, 26 ans) - premier mouvement de la cinquième symphonie – a l’honneur d’inaugurer le Concours. Son expression gestuelle, plutôt réservée, est très peu spectaculaire, assez linéaire, mais l’orchestre traduit sans hésiter les différentes remarques, suggestions, consignes et corrections dont il ponctue sa séance de travail.
Konstantin Chudovsky (Russie, 25 ans) - premier mouvement de la troisième symphonie - « prend le pouvoir » dès les premières mesures avec une baguette impérative, des gestes plus autoritaires, qu’il répétera régulièrement tels quels, mais à la juste lisibilité. Il n’a pas besoin de beaucoup de mots pour se faire « entendre ». Il fait preuve d’une belle énergie rythmique et assure de solides contrastes d’intensité.
Yukihiro Notsu (Japon, 30 ans) - premier mouvement de la troisième symphonie - dirige davantage en souplesse ; ses mouvements de bras traduisent un désir de faire chanter l’orchestre. Sa dynamique paraît peu marquée, mais le jeune chef est capable, il le prouve, de belles impulsions.
Nadia Wasiutek (France, 35 ans) – premier mouvement de la septième symphonie - une des deux femmes du Concours, conduit l’orchestre d’une gestuelle tranquille, souple, élégante, mais nette quant aux intentions qui la sous-tendent. Sa lecture du mouvement ne manque ni d’esprit de continuité ni de clarté.
Robert Forés Veses (Espagne, 36 ans) - premier mouvement de la cinquième symphonie - conclut la matinée. S’il commence par expliquer ses intentions détaillées à l’orchestre, s’il semble se fixer sur un même trait, il installe en fait le climat nécessaire à une interprétation dont on va découvrir – ressentir - qu’il la conçoit clairement : avec une grande précision rythmique, dans une atmosphère exactement nuancée, il nous emporte dans une vision très structurée et convaincante.
Alexandre Grandé (Israël, 35 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - nous en propose une lecture plutôt solennelle, à la cadence métronomique, tout en ne négligeant pas de marquer davantage les passages les plus dramatiques du morceau. Il informe clairement l’orchestre de ses intentions et en contrôle l’exécution.
Ivan Arboleya-Montes (Espagne, 33 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - s’installe devant l’orchestre comme pour une longue séance de répétition. Extraverti sans excès, manifestement doté d’une belle sensibilité, il stimule un orchestre qui répond immédiatement à ses impulsions. Et quand le jury lui signale que son temps est écoulé : « Oh ! It is time ! »
Benjamin Ellin (Royaume-Uni, 27 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - nous surprend, dans les premières mesures, par un tempo très lent, mais qui lui sert de tremplin pour une vision extrêmement maîtrisée du morceau. Pas beaucoup de paroles chez lui : ses indications gestuelles, son langage corporel sont absolument explicites, et beaux. Il a une réelle qualité d’écoute de ses interprètes. L’orchestre l’a d’ailleurs manifestement suivi avec plaisir.
Denys Proshayev (Ukraine, 29 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - a une gestuelle plus « dansante ». Il « descend » dans l’orchestre pour lui insuffler sa vision de l’oeuvre et en obtenir les sons et les nuances qu’il demande. Il privilégie un tempo rapide, restant cependant attentif à la précision des interventions des différents pupitres, invitant, par exemple, les cordes à retravailler un trait.
En conclusion, une première journée heureuse dans l’éventail des personnalités rencontrées et les propositions intéressantes qu’elles nous ont faites, dont certaines nous ont comblés.
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber
Les premiers battements de mesure du premier Concours International de Direction d’Orchestre Evgeny Svetlanov ont donc été donnés ce lundi matin, première journée des premières épreuves éliminatoires. C’est au Conservatoire de Luxembourg, dans une salle à la belle acoustique et très favorable à la convivialité musicale, que se sont fait entendre les premiers candidats.
Mais rappelons d’abord la composition du Jury : Vladimir Ashkenazy, aujourd’hui Directeur musical de l’Orchestre de la NHK, en est le Président. Ses membres : Rolf Beck, Intendant de l’Orchestre et du Chœur du NDR de Hambourg, Jean-Claude Casadesus, Directeur musical de l’Orchestre National de Lille, Paul Hughes, Directeur du BBC Symphony Orchestra à Londres, René Koering, Intendant de l’Orchestre et de l’Opéra de Montpellier, Alexander Müllenbach, compositeur, Lan Shui, Directeur musical du Singapore Symphony Orchestra, Alexander Vedernikov, Chef principal de l’Orchestre du Théâtre Bolshoï de Moscou et Elmar Weingarten, Directeur du Fonds Culturel de Berlin.
C’est à l’Orchestre Philharmonique de Luxembourg (OPL) que revient la belle et lourde charge d’être « l’outil de travail » des candidats. Ce lundi, il a déjà fait preuve de remarquables qualités d’« accompagnateur », avec une attention, un engagement, une souplesse, une endurance, une attention professionnelle et sympathique à leurs indications, qui ne peuvent être que profitables aux candidats.
Près de cent cinquante « dossiers » (curriculum vitae, cassette video, DVD) ont été adressés au Jury qui, après une première sélection, a retenu dix-huit candidats.
Lors du premier tour des éliminatoires (ces lundi 21, mardi 22 et mercredi 23 mai), les jeunes chefs disposent d’un temps de travail de vingt-cinq minutes. Il leur a été demandé de présenter le premier mouvement d’une symphonie de Beethoven : au choix, la troisième, la cinquième, la septième, des œuvres bienvenues pour se faire une première impression concrète des qualités musicales de leur lecture et d’interprétation, de leur personnalité et de leur conviction .
Ghun Kim (Américain, 26 ans) - premier mouvement de la cinquième symphonie – a l’honneur d’inaugurer le Concours. Son expression gestuelle, plutôt réservée, est très peu spectaculaire, assez linéaire, mais l’orchestre traduit sans hésiter les différentes remarques, suggestions, consignes et corrections dont il ponctue sa séance de travail.
Konstantin Chudovsky (Russie, 25 ans) - premier mouvement de la troisième symphonie - « prend le pouvoir » dès les premières mesures avec une baguette impérative, des gestes plus autoritaires, qu’il répétera régulièrement tels quels, mais à la juste lisibilité. Il n’a pas besoin de beaucoup de mots pour se faire « entendre ». Il fait preuve d’une belle énergie rythmique et assure de solides contrastes d’intensité.
Yukihiro Notsu (Japon, 30 ans) - premier mouvement de la troisième symphonie - dirige davantage en souplesse ; ses mouvements de bras traduisent un désir de faire chanter l’orchestre. Sa dynamique paraît peu marquée, mais le jeune chef est capable, il le prouve, de belles impulsions.
Nadia Wasiutek (France, 35 ans) – premier mouvement de la septième symphonie - une des deux femmes du Concours, conduit l’orchestre d’une gestuelle tranquille, souple, élégante, mais nette quant aux intentions qui la sous-tendent. Sa lecture du mouvement ne manque ni d’esprit de continuité ni de clarté.
Robert Forés Veses (Espagne, 36 ans) - premier mouvement de la cinquième symphonie - conclut la matinée. S’il commence par expliquer ses intentions détaillées à l’orchestre, s’il semble se fixer sur un même trait, il installe en fait le climat nécessaire à une interprétation dont on va découvrir – ressentir - qu’il la conçoit clairement : avec une grande précision rythmique, dans une atmosphère exactement nuancée, il nous emporte dans une vision très structurée et convaincante.
Alexandre Grandé (Israël, 35 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - nous en propose une lecture plutôt solennelle, à la cadence métronomique, tout en ne négligeant pas de marquer davantage les passages les plus dramatiques du morceau. Il informe clairement l’orchestre de ses intentions et en contrôle l’exécution.
Ivan Arboleya-Montes (Espagne, 33 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - s’installe devant l’orchestre comme pour une longue séance de répétition. Extraverti sans excès, manifestement doté d’une belle sensibilité, il stimule un orchestre qui répond immédiatement à ses impulsions. Et quand le jury lui signale que son temps est écoulé : « Oh ! It is time ! »
Benjamin Ellin (Royaume-Uni, 27 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - nous surprend, dans les premières mesures, par un tempo très lent, mais qui lui sert de tremplin pour une vision extrêmement maîtrisée du morceau. Pas beaucoup de paroles chez lui : ses indications gestuelles, son langage corporel sont absolument explicites, et beaux. Il a une réelle qualité d’écoute de ses interprètes. L’orchestre l’a d’ailleurs manifestement suivi avec plaisir.
Denys Proshayev (Ukraine, 29 ans) - premier mouvement de la septième symphonie - a une gestuelle plus « dansante ». Il « descend » dans l’orchestre pour lui insuffler sa vision de l’oeuvre et en obtenir les sons et les nuances qu’il demande. Il privilégie un tempo rapide, restant cependant attentif à la précision des interventions des différents pupitres, invitant, par exemple, les cordes à retravailler un trait.
En conclusion, une première journée heureuse dans l’éventail des personnalités rencontrées et les propositions intéressantes qu’elles nous ont faites, dont certaines nous ont comblés.
Stéphane Gilbart et Suzanne Faber